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16 juin 2011 4 16 /06 /juin /2011 10:59

Les Indous

 

Le Conte de Gabriac observe les hindous et nous en donne cette description : « Les Indous ont, comme on sait, la peau d'un beau brun chocolat; il en est qui sont aussi noirs que des nègres, mais leurs traits sont absolument semblables aux nôtres. Leur costume, qui diffère suivant, les localités, est superbe à Bombay. seulement on
voit ces immenses turbans, qui renferment 40 à 50 tres d'étoffes. Ils ont presque le diamètre d'un parasol, et sont aussi majestueux qu'utiles contre le soleil. Il y en a de toutes couleurs, mais les blancs et les rouges dominent. Le reste du costume est des plus simples; il se compose d'une large houppelande qui descend jusqu'à terre, croisée et serrée à la taille par une ceinture de couleur voyante 
».

 

Edmont Cotteau nous décrit les Hindous avec beaucoup de détail : « Les Mahratta-Family-Group-Photograph----India-c1880.jpgHindous des différentes castes entrent pour les deux tiers dans le chiffre total; ils se divisent en deux grandes familles, les adorateurs de Vichnou, le conservateur, et ceux de Siva, le destructeur, la deuxième et la troisième personne de la trinité indienne. Les premiers tracent sur leur front une ligne perpendiculaire. les seconds une ligne horizontale; chaque matin, autant que possible, la peinture de ces lignes doit être renouvelée par un brahmine. La multitude adresse aussi ses hommages à d'autres divinités secondaires, telles que les épouses des dieux que nous venons de nommer, le dieu Gunputti à tête d'éléphant et bien d'autres. Après les brahmines, la classe la plus importante parmi les Hindous est celle des banians, ou marchands. La plupart sont originaires du Guzerate, pays, situé au nord de Bombay. Contrairement aux autres Indiens, ils ne montrent aucune répugnance pour les longs voyages, surtout s'ils doivent contribuer à augmenter leur fortune; ils font preuve d'une rare habileté dans le commerce; de là vient le proverbe indien : « II faut trois juifs pour faire un Chinois, et trois Chinois pour faire un Banian. » Tous parlent et écrivent le guzerate; c'est le langage le plus répandu à Bombay, et en même temps la grande langue commerciale de l'Inde ».

 

Il nous décrit également les mahrattes et les musulmans : « Les Mahrattes n'ont pas les mêmes dispositions pour le commerce c'est un peuple guerrier et agriculteur. Ceux qui habitent les villes se font employés ou hommes de loi. Leurs habitations sont moins confortables que celles des opulents Guzerates. Les mahométans sont partagés en deux grandes divisions, les sunnites et les chiites; les Turcs et les Arabes appartiennent à la
première; les Persans à la seconde. Cette dernière est la plus nombreuse à Bombay et comprend la tribu des borales, marchands colporteurs spéculant sur toutes sortes de marchandises, musulmans de religion, mais juifs d'apparence et possédant le caractère et le génie particuliers à cette race
 ».

 

Hugues Krafft a quelque mal à s’y retrouver dans la population locale : « Il y a de tous côtés une telle infinité de turbans divers qu'il faudrait des études spéciales pour en approfondir l'origine et la signification! Comment ranger cette foule incomprise par castes de Brahmines, de Chétris, de Waïshias et de Soudras? Les coiffures les plus pittoresques et les plus extravagantes défilent les unes après les autres, tantôt enchevêtrées en mélange d'étoffes rouge et or, tantôt ornementées d'appendices bizarres qui surgissent sur les occiputs. Sur dix de ces Hindous à turbans, on en voit huit ou neuf avec des anneaux d'or dans la partie supérieure de l'oreille et portant sur leur front brun des peintures mystérieuses, tracées en petits ronds, en raies blanches, rouges ou jaunes au-dessus de leurs yeux noirs. Les rares femmes qui marchent dans la rue ont toutes des anneaux dans le nez et aux oreilles, des quantités de bagues et de bracelets clinquants aux mains et aux pieds. »

 

L’économie de Bombay

 

Nos voyageurs font également des observations sur l’économie. Jacques Siegfried qui est administrateur d’une grande banque française note avec amertume : « quant à la France, elle n'est représentée encore que par une agence du Comptoir d'escompte et par une seule maison de commerce, celle de MM. Jules Siegfried et Compagnie, à côté de laquelle il y a évidemment place encore pour bien des Français ».

 

Edmond Cotteau rappelle l’importance économique de Bombay : « Cette prépondérance ne résulte pas uniquement de sa grande population, qui est déjà supérieure à celle de Calcutta , mais aussi de sa supériorité manufacturière et financière. C'est à Bombay et dans le district de Bombay que se trouvent le plus grand nombre de filatures, et ce sont les produits de cette industrie qui alimentent les trois cinquièmes de l'exportation ».

 

Théodore Duret explique, en 1874, la réussite de Bombay : « Bombay est une grande ville, très riche, très commerçante, qui compte aujourd'hui six cent mille habitants. Sa prospérité repose entièrement sur le coton. L'Inde, avant la guerre de la sécession d'Amérique, n'exportait qu'uneCotton-Bales-at-the-Port---Bombay--Mumbai--1860-s.JPG quantité restreinte de coton d'assez mauvaise qualité. Sous le coup de la disette de coton amenée en Europe par la guerre, les Anglais donnèrent à la culture du coton dans l'Inde une vigoureuse impulsion. Les qualités furent partout améliorées, la quantité prodigieusement augmentée, et telle est la consommation de coton qui se fait aujourd'hui dans le monde, que quoique, depuis, l'Amérique ait repris l'importance de sa production première, l'Inde n'en continue pas moins à écouler les quantités accrues qu'elle s'est mise à produire. A Bombay, tout repose sur le coton, tout existe pour lui : les négociants qui l'achètent, les industriels qui le pressent et l'emballent, les navires qui l'emportent. Vous devez tout de suite apprendre les termes du métier et les prix, on vous enseigne à juger des qualités à la longueur des soies, ici on vit dans le coton. On en rêve la nuit. On finit par être étonné de ne pas se trouver changé le matin en balle de coton ».

 

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14 juin 2011 2 14 /06 /juin /2011 10:56

Les domestiques

 

Une des choses qui marquent les voyageurs est le nombre de domestiques. Jacques Siegfried explique : « Si je voulais me plaindre de quelque chose, ce serait du nombre, des domestiques qu'imposent les anciennes coutumes de la Compagnie des Indes et les superstitions des castes hindoues. Vix est certainement parmi les plus modérés ; eh bien, il a dix-sept domestiques dans sa maison ! L'un est cocher, mais consentirait pour rien au monde à donner un coup de brosse à sa voiture ; l'autre allume les lampes et ne frotterait jamais un meuble, un troisième enfin n'a d'autre besogne que de promener le chien. Quant à celui qui joue auprès de vous le rôle de valet de chambre, il est constamment collé à vous, pas moyen de s'en débarrasser; il veut vous mettre jusqu'à vos bas, on ne saurait rien concevoir de plus ennuyeux ».

 

Francis de Croisset[1] (photo) cite la lettre reçue d’un ami indiecroisset_francis.jpgn qui lui donne des conseils sur le choix des domestiques : « Vous dois choisir aussi une boy. La boy a de dix-huit à soixante ans. Vers trente-cinq ans, il est préférable. La boy est toujours honnête, parce qu'il a intérêt à ce qu'on ne vole pas dans vos bagages ce qu'il finira par vous prendre.
Vous donne au boy dix-huit roupies par semaine pour sa nourriture : c'est la tarif. Il met dix-sept roupies et demie de côté et, avec le reste, il mange. Vous vous occupe jamais de sa logement. Une boy n'a pas besoin de lit : voua le dépose sur des clous ou sur des couteaux, et il s'endort en rêvant qu'il est monté chez Vichnou
 ».

 

Hugues Krafft fait, sur ce même sujet, ce commentaire : « Partout la domesticité est innombrable, puisqu'il s'agit, même pour un train de maison ordinaire, de légions de serviteurs plus ou moins paresseux, voués à des attributions exclusives dont rien ne les ferait démordre. C'est ainsi qu'il faut des Musulmans pour le service de la cuisine et de la table, parce que les Hindous pratiquants ne veulent pas toucher à la nourriture européenne. Il est vrai que le salaire de tout ce monde est comparativement peu élevé : les gages d'un maître d'hôtel musulman ne dépassent pas 18 à 20 roupies (40 à 45 francs), tandis qu'un employé infime, tel qu'un coupeur d'herbe pour les chevaux, n'est payé que 4 à 5 roupies par mois, soit 12 francs pour nourrir femme et enfants ! »

 

Les Parsis

 

Mais une des choses qui frappent le plus nos voyageurs français est le rôCotteau.jpgle et la situation des Parsis dans la ville de Bombay. Edmond Cotteau (photo) rappelle qu’ils sont « les plus gros banquiers de l'Inde et les princes du commerce ». Il ajoute : « Les Parsis ne forment guère que 7 pour 100 de la population totale; mais leur aptitude aux affaires, leur activité commerciale, l'absence de tout préjugé de caste et l'assimilation complète qu'ils se sont faite de la langue anglaise, leur assurent une influence prépondérante dans la communauté ».

 

Un autre voyageur visite les Tours du Silence : « Dans l'enceinte close de murs, au milieu d'un jardin, se trouvent quatre ou cinq grosses tours ventrues. Sur leur sommet en cuvette et fermé par une grille, sont déposés les cadavres parsees sans distinction de fortune. Les cadavres des hommes et ceux des femmes sont toutefois séparés sur la grille
commune. C'est seulement une fois dépouillés de la chair que les os des uns et des autres se trouvent indistinctement réunis dans le pied de la tour, suivant le principe parsee
qui n'admet plus de distinction après la mort. Quelques Parsees extrêmement riches possèdent cependant des tours de famille. Je ne juge de ces détails que par un relief en réduction exposé dans l'enceinte même, car en réalité on ne voit que les vautours perchés sur le sommet de ces fameuses tours (dont les- détails intérieurs de construction restent invisibles). Ces animaux repus interrogent l'horizon de leur regard perçant. Le fait est qu'un Parsee est un morceau d'importance pour un vautour ; ils se portent généralement fort bien de leur vivant, et il en reste quelque chose après la mort.
Les Parsees se ressemblent tous : ils sont blancs et offrent le même type : nez busqué, moustache, favoris courts, ventre très précoce, comme il convient à d'honnêtes ronds de cuir. Ils tiennent une grande partie du commerce de Bombay. Leurs femmes sont parfois très jolies (costume spécial des femmes parsees) ».

 

Lparsimen.jpge Conte de Gabriac visite un temple parsi : « Après avoir gravi de nombreux escaliers de granit, embellis de plusieurs monstres de marbre de toutes couleurs, nous vîmes un bâtiment carré, soutenu par des colonnes, au centre duquel était une flamme que l'on entretenait perpétuellement.-—C'était la déesse—Une foule de Parsis se prosternaient devant elle et semblaient l'adorer. Cependant, il ne faut pas s'y tromper, ce culte est moins absurde qu'on pourrait le croire. En effet, un Parsi que nous plaisantions d'adorer ainsi le feu, nous répondit : « Ce n'est pas le feu que nous adorons, nous n'adorons que Dieu, mais nous trouvons que cette flamme, vivante et pure, qui nous anime et nous réchauffe, est la plus belle image de la divinité et vaut mieux que les statues des idolâtres ».

 

Henri d’Orléans note plus sobrement : « Les parsis sont à Bombay ce que sont les Chinois au Japon : ils représentent la classe industrieuse et habile, les marchands, les gens d'affaires, les compradores. Ils sont riches et vivent à part, formant comme un peuple séparé qui a ses écoles, son théâtre et surtout son cimetière, cette fameuse Tour du Silence, les cadavres des fidèles sont offerts en pâture aux vautours ».

 

Jacques Siegfried est également sobre sur ce sujet : « Mais si la fête me laissa froid, j'eus du moins beaucoup de plaisir à causer avec quelques parsies. C'est là une des classes les plus avancées de Bombay. Ce ne sont pas des hindous à proprement parler, puisqu'au lieu de révérer Brahma, ils adorent le feu et le soleil comme leurs ancêtres persans et sont, en un mot, de la religion de Zoroastre. Aux Indes, on ne les rencontre du reste qu'à Bombay et à Surate, et ils forment une infinie minorité en comparaison des 160 millions d'hindous et des 20 millions de mahométans qui sont répandus dans tout l'empire ».

 

François Devay[2] est impressionné par les tours du silence : « Près de la place élevée où, tout en admirant le splendide tableau qui s'étendait devant nous, nous devisions dés futures destinées de Bombay, M. G. me fit remarquer, au sommet de la colline et au milieu d'un enclos, où quelques palmiers montrent leur tête au-dessus des murs, une rotonde sans toit, haute de 8 à 10 mètres, et d'un diamètre d'environ 20 mètres. Six tours pareilles existent sur des hauteurs autour de Bombay : ce sont des Bokhmas, ou Tours de silence, construites par les parsis pour y exposer les cadavres de leurs morts. Nous n'apercevions que le contour supérieur de la tour, à cinquante pas de nous; la crête circulaire du mur était occupée par mie vingtaine de vautours, au jabot gonflé. Les parsis ne permettent à personne l'entrée de l'enclos, et à plus forte raison de la tour ».

 

Un voyageur note en 1900 : « Cette race d'adorateurs du feu, remarquable par son génie financier et commercial, occupe, en effet, une position prépondérante parmi les hautes classes de Bombay et la munificence de ces puissants commerçants asiatiques a valu à plusieurs d'entre eux la qualité de chevaliers (« Knights ») voire même celle de « Baronet » héréditaire qui les font figurer dans l'annuaire de la noblesse britannique sous les noms baroques de « Sir Jamseljee Jeejebhoy », « Sir Mungultass Nalhoobhoy », « Sir Cowasjee Jehangir » et autres ».

 

Hugues Krafft ne comprend pas cette tradition des tours du silence : « En leur qualité d'adorateurs du feu, leur culte les empêche de brûler leurs morts. Qu'en font-ils? Ils les donnent en pâture à des vautours. Chaque Parsi se trouve donc un beau jour inhumé par petits morceaux dans une centaine d'estomacs d'oiseaux carnassiers ! ». Et il ajoute : « Ils se croient bien supérieurs à tous les Hindous, affectent des tendances occidentales, et tiennent le grand commerce entre leurs mains ».

 

A SUIVRE

 



[1] In “ Nous avons fait un beau voyage » par Francis de Croisset. Bibliothèque nationale de France, département Littérature et art, 8-Y2-75772

[2] In “ Journal d'un voyage dans l'Inde anglaise, à Java, dans l'archipel des Moluques, sur les côtes méridionales de la Chine, à Ceylan (1864) », par Fr. Devay. Bibliothèque nationale de France, département Philosophie, histoire, sciences de l'homme, 8-NT-759 (2)

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12 juin 2011 7 12 /06 /juin /2011 10:53

L’ambiance de la ville

 

Le Comte bourne1880s.jpgde Gabriac nous décrit l’arrivée dans le port de Bombay et sa turbulente ambiance : « Aussitôt nous fûmes accostes par une foule de petites barques montées par des nègres, des Européens, des Malais, des Chinois ou des Parsis, mais aucune ne renfermait d'Indous, leur religion leur défendant de s'aventurer sur la mer. Après la visite de la santé et de la police, le pont fut envahi par la foule bariolée dont je viens de parler, composée en grande partie de portefaix médaillés qui se chargèrent de transporter nos bagages à domicile, sans que nous eussions à nous en occuper. Ce service se fait aux Indes plus régulièrement et avec plus de facilité qu'à Londres ».

 

Nos voyageurs sont étonnés par le caractère bouillonnant de la ville ce que l’un deux résume joliment : « L'aspect de cet Orient condensé, bourdonnant, agité, si neuf pour qui a vu l'Orient si calme partout ailleurs, a quelque chose de quasi fantastique et de surprenant ».

 

Ces voyageurs français ne se déplacent pas sans plusieurs lettres de recommandations et sont presque toujours invités par les Européens de Bombay. Un officier en congés note à propos du Byculla Club : « Arrivons enfin. Splendide Byculla-Club au milieu de jolis jardins; — ses immenses dimensions; — son intelligente disposition. Des courants d'air traversent le club en tous sens, de sorte que pas un souffle d'air n'est perdu pour les membres à l'intérieur ; de vastes vérandas sont couvertes de petites tables luxueusement servies. Dîner remarquable avec pamphrets (poissons renommés du pays) et le meilleur claret que j'aie bu aux Indes. Pendant que les pankas nous éventent du plafond, un coolie, avec un vaste éventail à pied dans la main, balance son instrument et nous envoie de l'air par côté, tout le temps du dîner ».

 

Le Comte de Gabriac fréquentera également ce BycBombay--Mumbai--Byculla-Hotel---19th-Century-Photograph.jpgulla-Club : « Cet établissement, fondé et soutenu par une Compagnie anglaise, est dirigé par des Parsis et servi par des Indous. Les chambres sont de simples alcôves, placées dans une même salle, et les cloisons qui les séparent n'ont que 3 mètres de hauteur, de sorte que le plafond est commun pour tous. Le but de cet arrangement est de donner le plus d'air et de fraîcheur possible, mais il est fort incommode en ce que l'on n'est jamais chez soi. On entend tout ce que dit le voisin, et en revanche, on ne peut pas se quereller à son aise dans son intérieur ! Pour terminer ce qui a traita Bayculla-Hôtel, je dois lui rendre cette justice que l'on n'y est guère dérangé par les serpents, et que, sous ce rapport, l'on peut y dormir en toute sécurité. On prétend, en effet, que ces animaux, très nombreux aux environs de Bombay, s'introduisent souvent jusque dans les maisons. Un voyageur m'avait raconté, aussi qu'en arrivant dans cette ville, la première chose qu'il avait vue était un serpent, qu'il en avait trouvé un autre dans son bain, et le troisième dans son lit ».

 

Bien entendu nos voyageurs commentent et décrivent la population : « La race de ce pays est celle qui m'a la première et peut-être le plus frappé dans toute l'Inde. Les hommes maigres et chétifs, quoique assez grands, sont ce qu'ils sont dans toute l'Inde : la tête couverte de turbans extrêmement variés et souvent très travaillés, véritables merveilles de soin, de patience et de finesse. Les jambes des Indous aisés sont couvertes du pantalon étroit tire- bouchonné et ils portent la grande, éternelle et laide capote indoue qui place la taille directement sous les bras. Mais comment, en débarquant, ne rien dire des femmes de ce pays ? Leur petit costume dégagé à l'excès leur laisse les jambes libres et nues jusqu'à mi-cuisse ; le bassin est étroitement serré dans un pagne qui, passant ensuite en écharpe le long du corps à moitié nu, va se terminer sur la tête, à la chevelure plaquée et au petit chignon anglais, laquelle supporte très souvent un fardeau très lourd et volumineux ; le cou et les reins nus sont alors tendus sous le poids comme un ressort d'acier. Ces femmes tiennent leurs grands yeux toujours baissés, surtout pour les étrangers qui semblent ne pas exister pour elles. Les épaules et les seins sont comme cousus dans un court corsage dont la teinte foncée se marie avec la couleur bronzée de leur peau. L'impassibilité de leur visage est telle que les pieds, tout en rasant précipitamment la terre, et surtout les bras, en se balançant, semblent seuls accuser le mouvement ; le reste de leur personne se transporte immobile comme un bronze ».

 

A propos des femmes, le Comte de Gabriac note : « Mais ce qu'il y a de singulier Studio-Portrait-of-an-Indian-Woman-in-Sari-and-various-Orna.jpg notre point de vue) dans leur costume, c'est que leur petit corsage ne couvre que la partie supérieure du corps et laisse à nu le dessous des seins et la plus grande partie du ventre. Si cette mode nous paraît bizarre, en revanche elle permet de voir des formes arrondies et charmantes. Ces femmes sont toujours surchargées de larges anneaux de cuivre ou d'or, qu'elles portent aux bras, aux oreilles et au nez. Elles ont toutes de magnifiques yeux noirs et de luxuriantes chevelures d'ébène ; malheureusement la bouche, trop fendue, détruit l'harmonie de l'ovale ».

 

Jacques Siegfried[1] décrit la manière dont les Indiens sont habillés : « Le premier coup d'oeil est infailliblement absorbé par l'énorme turban qui les garantit du soleil et dont la forme, la couleur et l'ampleur varient selon la caste et l'emploi du sujet. Du turban, le regard descend au front tatoué de dessins rouges, jaunes ou blancs, selon la divinité sous la protection de laquelle chacun s'est mis plus  spécialement ; puis aux oreilles indéfiniment allongées et déformées par de riches et lourds bijoux. Enfin une tunique blanche, serrée par une grosse ceinture, descend jusqu'à leurs genoux par-dessus une espèce de jupe-pantalon d'où sortent leurs pieds nus chaussés de babouches pointues. J'aurais ri volontiers de quelques détails, et cependant, à tout prendre, je trouvais en eux une certaine dignité qui me plaisait et qui semble inhérente aux Orientaux. Je dois ajouter que j'avais devant moi des hommes des classes les plus élevées et que ma description ne saurait s'appliquer aux Hindous en général ».

 

A SUIVRE

 



[1] In “ Seize mois autour du monde, 1867-1869, et particulièrement aux Indes, en Chine et au Japon ». Par Jacques Siegfried. Bibliothèque nationale de France, département Philosophie, histoire, sciences de l'homme, G-29146

 

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10 juin 2011 5 10 /06 /juin /2011 10:51

Il est intéressant, parfois amusant, de relire les livres écrits par ces nombreux voyageurs français qui se sont rendus à Bombay au cours des vingt dernières années du XIX° siècle. A cette époque l’Inde compte déjà 180 millions d’habitants et Bombay, centre commercial important, avec notamment les exportations de coton, a un peu moins de 700.000 habitants. Un de ces voyageurs en précisera le décompte exact : Hindous 410,000, Musulmans 137,800, Parsis 44,000, Chrétiens natifs, Eurasiens et métis portugais 27,000,  Bouddhistes et Jaïns 15,000, Européens 7,000, Juifs 2,500, Nègres et Chinois 2,000. Voici quelques extraits des impressions et commentaires de ces voyageurs, commentaires que nous avons illustrés avec quelques photos d'époque.

 

 

Premières impressions

 

HdOrleans_Henri.jpgenri d’Orléans (photo) est frappé par Bombay[1] : « Une fois débarqué, ce qui me frappe tout d'abord c'est la grandeur de là ville européenne. J'aperçois partout de larges boulevards que bordent des monuments gigantesques : hôtels,  palais de justice, églises. Il est vrai que le plus parfait mauvais goût a présidé en général à ces constructions : l'art arabe s'y mêle au style grec avec quelques réminiscences de goût chinois, ce qui produit un singulier effet à qui vient de voir le Parthénon. Mais c'est solide, bien bâti, grandiose ; ces édifices semblent en quelque sorte être des sentinelles placées aux portes des Indes, pour attester au nouvel arrivant la grandeur et la puissance de l'empire colonial anglais ».

 

Un officier en congés note la qualité des installations des anglais[2] : « A peine débarqué, on est frappé de la façon dont les Anglais se sont largement installés : de l'air, de grandes places, de vrais monuments pour le moindre office. On conçoit que chacun puisse ici trouver sa place et son confort ».

 

Paul Ferniot nous décrit la ville de Bombay[3] : « Au centre du fort est un jardin circulaire, orné d'une fontaine et de belles statues. Tout autour sont les magnifiques constructions du cercle d'Elphinstone. Le Rampart-Row est une longue ligne de belles maisons à arcades où sont installés le Club de Bombay et le Comptoir d'escompte de Paris. La ville native est séparée du fort par un espace vide, large de prés de deux kilomètres. Ses rues principales sont parcourues du malin au soir par des tramways qui mettent en communication ses faubourgs les plus reculés avec les quartiers anglais de l'esplanade et du fort et la pointe de Colaba. Kabaldavie et Pareil- Road sont les plus larges et les plus commerçantes. On y voit beaucoup de maisons, à façades peinturlurées, hautes de quatre ou cinq étages, en saillie et avec balcons ; des boutiques dans le goût européen, tenues par des Parsis, sont mêlées aux échoppes des indigènes ».

 

Edmond Cotteau, comme la plupart des voyageurs, remarque le malabarhill1900.jpgquartier résidentiel de Malabar-Hill[4] : « Malabar-Hill, où nous allons ensuite, ne comptait que deux maisons il y a une trentaine d'années. Aujourd'hui, la colline tout entière est transformée en un parc ravissant où sont disséminés, sous l'admirable végétation des tropiques, une foule de villas et de cottages habités par la population européenne. Une route charmante longe la plage de Breach-Candi et remonte ensuite sur les hauteurs. On peut visiter, en passant, l'étang sacré de Walkeshwar et les temples de Mahadeva. Tout à fait à l'extrémité du promontoire, à Malabar-Point, s'élève la maison de campagne du gouverneur sa situation éminemment pittoresque, l'air frais qu'on y respire en toute saison, en font la plus agréable habitation de toute la ville ».

 

En 1900, un voyageur note[5] : « Bombay est une ville de palais. La grandeur et le luxe que la puissance britannique déploie volontiers dans les constructions officielles ou commerciales s'y révèle plus encore qu'à Madras ou à Calcutta. On sent qu'ici se trouve le centre principal du commerce anglais dans l'Inde, aussi bien que de ses communications avec l'Europe ».

 

Hugues Krafft[6] note en 1885 : « Le quartier le plus moderne, le Fort, où se concentrent les bâtiments du Gouvernement, les bureaux, notre hôtel, etc., se termine par le quai d'Apollo-Bunder, déjà nommé. Au nord s'étend la native town, vivante et colorée; à l'ouest, Malabar-Hill, longue colline baignée par la mer sur deux côtés. Elle est le centre des villas européennes, joliment disséminées dans de riants jardins, où vivent tous les résidents qui veulent fuir la température étouffante de la ville. Costumes indigènes à part, le Fort est décidément tout ce qu'il y a de moins couleur locale : les larges rues et les vastes places, les constructions luxueuses en style gothique, les colonnades imposantes, l'éclairage au gaz et à l'électricité, les magasins somptueux largement approvisionnés des objets les plus nouveaux et les plus chers, tout cela forme un ensemble européen qui serait complet si les couleurs vives des turbans indigènes ne venaient y jeter une note orientale ».

 

A SUIVRE



[1] In « Six mois aux Indes, chasses aux tigres », par le prince Henri d'Orléans. Bibliothèque nationale de France, département Philosophie, histoire, sciences de l'homme, 8-O2K-917 (A)

[2] In, « Notes de voyage aux Indes, en Chine et au Japon, par un officier en congé », Bibliothèque nationale de France, département Philosophie, histoire, sciences de l'homme, 8-O2-730

[3] In « L'Inde, lectures de géographie et d'histoire accompagnées d'analyses, de résumés, de notes et notices explicatives, etc., et de nombreuses gravures, par Paul Ferniot. Bibliothèque nationale de France, département Philosophie, histoire, sciences de l'homme, 8-O2K-1109

[4] In « Bombay, la ville des Parsis » par E. Cotteau. Bibliothèque nationale de France, département Philosophie, histoire, sciences de l'homme, 8-G-2705 (40)

[5] In “Journal d'une promenade autour du monde en 118 jours. Etats-Unis, Japon, Chine, Ceylan, Inde, Egypte, Terre-Sainte », Bibliothèque nationale de France, département Philosophie, histoire, sciences de l'homme, 8-G-7788

[6] In “Souvenirs de notre tour du monde » / par Hugues Krafft, Bibliothèque nationale de France, département Philosophie, histoire, sciences de l'homme, 4-G-293

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9 juin 2011 4 09 /06 /juin /2011 16:16

MF-Hussain-painter.jpgAux toutes premières du jour, ce matin, à Londres, Maqbool Fida Husain, plus connu sous le nom de Husain, est décédé d’une attaque cardiaque. Il était âgé de 95 ans.

 

Husain est l’un des plus grands peintres indiens ; surnommé le Picasso de l’Inde, il a produit un grand nombre d’œuvres et s’était fait connaître dés les années 1940.

 

Fort malheureusement, certaines de ses toiles, montrant quelques divinités hindoues dénudées, ou sa fameuse toile « Mother India », lui ont valu  d’être la cible d’un combat sans merci de la part des nationalistes hindous ; plus de 4000 plaintes ont été ainsi portées contre lui ; ceci a conduit Husain à s’exiler et à vivre à Londres.

 

Le premier ministre indien a déclaré que la disparition de Husain était une perte pour la nation indienne. Mais on peut regretter que ce gouvernement n’ait pas fait grand-chose pour permettre à Husain de revenir en Inde où il aurait aimé finir ses jours.

 

Ceux qui s’intéressent à la peinture peuvent relire les deux articles que nous lui avions consacrés en mars 2010.

 

http://www.indiablognote.com/article-maqbool-fida-husain-un-tres-grand-peintre-indien-1-2-45789038.html

 

http://www.indiablognote.com/article-maqbool-fida-husain-un-tres-grand-peintre-indien-2-2-45789083.html

 

 

Nous saluons le talent et la mémoire de ce grand artiste.

 

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30 mai 2011 1 30 /05 /mai /2011 16:17

Notre ami Frédéric Bobin vient de signer un excellent article dans "Le Monde".

 

Il s'agit de ce qui se passe à la frontière indo-pakistanaise entre Lahore et Amritsar. Comme toujours c'est très bien écrit !

 

Il y a plusieurs mois, nous avions eu un déjeuner des plus intéresants avec nos amis Frédéric Bobin,  Jean-Marie et Rehana Lafont (deux grands connaisseurs de l'Inde et du Pakistan) à Delhi et nous avions évoqué ce sujet, cet endroit que Jean-Marie et Rehana connaissent bien.

 

A lire sur :

http://www.lemonde.fr/asie-pacifique/article/2011/05/27/a-wagah-le-drole-de-front_1528325_3216.html

 

 

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25 mai 2011 3 25 /05 /mai /2011 10:36

Les maharadjahs de Bharatpur et de Gwalior

 

4-20BharatpurTwenty-20Houdah-20Saloon-20-1925-20-1-.jpgLe Maharadjah de Bharatpur possédait par exemple 22 Rolls-Royce, dont une décapotable en argent massif. Celui de Gwalior adorait jouer avec un incroyable train électrique, monté sur des rails également en argent massif, qui traversait tout le palais et, venant des cuisines chargé de plats, s'arrêtait à la table de réception devant chacun des invités du prince. Il comportait même des wagons-citernes remplis de whisky et de vin. Les Maharadjahs adoraient la chasse au tigre, qu'ils pratiquaient sur des éléphants harnachés avec luxe. Ces aristocrates firent rêver ou scandalisèrent, mais jamais leurs lubies et leur faste ne laissèrent indifférent.

 

 

 

Le nizam d’Hyerabad, Mahbub Ali Khan VI

 

heh-nizam-of-hyderabads-rolls-royce-throne-car_4BrDB_3868.jpgUne des Rolls indiennes les plus admirées est sans conteste la limousine Silver Ghost de 1911. Plus connue sous le vocable Throne Car, cette voiture d'apparat peinte en jaune a été commandée par le nizam d'Hyderabad Mahbub Ali Khan VI. Sa singularité : un chapeau en forme de coupole coiffe l'espace arrière. Elle a été commandée par le nizam en 1911 mais la voiture ne fut livrée qu’en mars 1913 après la mort du nizam. Son fils en héritera. Cette voiture a « régné » pendant 23 ans à Hyderbad mais durant cette période n’a parcouru que 450 km !

 

Cette Rolls vient d'être restaurée par le joaillier Cartier.

 

 

 

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Le Maharadjah Jamsaheb Digvijaysinhji, de Nawanagar

 

 

Ce Marahadjah (1895-1966) fut un joueur de cricket célèbre et aussi un fervent partisan de l’indépendance de l’Inde. On le voit sur la photo avec sa fille, la princesse Harshad Kumari.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

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Le Maharadjah de Mysore

Ce Maharadjah n’avait pas moins de 24 Bentleys et Rolls Royce. Sur la photo, une Bentley 1951.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

L’actuel Maharaja Mandhatasinh Jadeja, petit-fils du Maharaja de Rajkot, a pu racheter la Rolls de son grand-père pour $850,000. Il s’agit de la magnifique Rolls Royce 1934 Phantom II.

 

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 L’an dernier Cartier avait organisé une exposition de ces vieilles voitures indiennes ; cela se passait au Polo Club de Delhi. 52 modèles ont été exposés mai son estime qu’il existe encore en Inde 6000 vieilles voitures anciennes.

 

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24 mai 2011 2 24 /05 /mai /2011 04:33

 

 

  z_p15-Salim-01.jpg

Les couples amoureux les plus célèbres du monde sont connus : Roméo et Juliette, Clopâtre at Marc-Antoine, Tristan et Yseult, Orphée et Eurydice, Odysée et Pénélope… En Inde, il y eut Arjumand Ban et  l’empereur Shah Jahan, et il y eut aussi Salim (qui deviendra l’empereur Jahangir) et Anarkali. Voici leur histoire.

 

L’histoire se passe du temps de l’empereur moghol Akbar (1542 – 1605). Akbar a un fils, le prince Salim. Le jeune prince Salim, à peine adolescent, est envoyé pendant 14 ans dans l’armée impériale afin d’apprendre la discipline et le maniement des armes. Puis Akbar autorise son fils à revenir et une grande fête est organisée dans le palais à Lahore pour fêter son retour.

 

Le harem d’Akbar décide d’organiser une danse avec une danseuse très belle nommée Nadeera ; et come sa beauté était exceptionnelle, Akbar la surnomma Anarkali ce qui veut dire (grenade en fleurs).

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Le prince Salim tomba aussitôt follement amoureux d’Anarkali et cet  amour fut réciproque. Les jeunes tourtereaux se voient donc régulièrement et assez vite, Salim informe son père qu’il compte épouser Anarkali. Mais Akbar réagit très mal et s’oppose à ce mariage car Anarkali n’est pas noble. Devant l’entêtement de son fils, l’empereur fait arrêter Anarkali et l’emprisonne dans l’un des donjons du palais.

 

Salim, aidé par quelques amis, réussit à faire évader Abarkali et la cache en dehors de Lahore. Il forme également une armée, bien décidé à affronter son père. Mais l’armée de l’empereur est bien plus puissante et Salim doit se rendre. Son père ne lui laisse que deux possibilités, lui rendre Anarkali ou être condamné à mort. Salim choisit de mourir. Anarkali, apprenant cela, se livre à l’empereur et lui demande d’être tuée à la place du prince et elle demande à l’empereur qu’il lui accorde une dernière faveur ; passer une nuit avec le prince avant de mourir.

 

Les amants pAnarkali-1953.jpgassent ainsi une dernière nuit d’étreintes ensemble. Le matin, Anarkali parvint à droguer le prince afin qu’il puisse  supporter son départ ; elle est emmenée par des gardes à l’extérieur du palais où un grand fossé a été creusé. Elle est enfermée dans une petite cage de bois et la cage est descendue au fond du fossé. Le fossé est aussitôt recouvert de terre et de briques. Elle est ainsi enterrée vivante.

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Il  existe cependant une autre version de la fin de ce tte histoire. L’empereur aurait finalement aidé Anarkali à s’enfuir contre la promesse qu’elle quitte l’empire moghol.

 

Anarkali a inspiré plusieurs films; le premier fut Loves of a Moghul Prince, en 1928. Un autre film fut réalisé en 1953, Bina Rai jouant Anarkali.  Un autre film, au Pakistan, fut réalisé en 1958 avec la légendaire Noor Jehan. En Inde en 1960 un nouveau film sortit avec l’actrice Madhubala.  

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23 mai 2011 1 23 /05 /mai /2011 10:34

La légende de la Rolls Royce

 

Point n’est besoin de rappeler ce qu’est Rolls-Royce !

 

Mais la légende Rolls-Royce tient avant toute chose aux qualités et à la finition irréprochables de ses modèles. Les deux tiers des véhicules produits depuis l'origine circulent encore! L'AX 201 - le numéro d'immatriculation d'une des premières Silver Ghost, conservée à l'usine - a dépassé les imagesCAROAC66.jpg800 000 kilomètres. C'est bien connu: une Rolls ne tombe pas en panne, elle «s'arrête de fonctionner»... Le résultat d'un savoir-faire unique. Au siège de la firme, à Crewe, au sud de Manchester - berceau de la sidérurgie britannique - on ignore les cadences infernales. Une fois, alors que l'on demandait à un responsable: «A quelle vitesse avance la ligne de montage?» celui-ci répondit, flegmatique: «Je pense l'avoir vu bouger la semaine dernière.»

 

Il faut ainsi trente jours pour fabriquer une Rolls. Résultat: y compris les Bentley, quelque 127 000 voitures seulement sont sorties des ateliers depuis 1904.

 

Crewe reste le temple du fait-main et chaque voiture embarque à son bord ce qui se fait de mieux sur le marché - de la marquetterie de buis au tapis en laine d'agneau... Il faut ainsi 12 peaux de vache, livrées par le célèbre tanneur londonien Connolly, pour garnir l'intérieur d'un véhicule. Toutes proviennent de Scandinavie et principalement du Danemark, là où il n'existe pas de fils de fer barbelés susceptibles d'abîmer le cuir des bêtes. De même, la ronce de noyer, utilisée pour confectionner le tableau de bord, provient de Californie. Les glaces sont polies avec une pierre ponce dont le degré de finesse ne s'emploie qu'en optique. Il faut encore une journée pour fabriquer, sans aucun instrument de mesure - juste à l'oeil - une calandre et cinq heures de polissage pour lui donner son éclat: chaque pièce - qui reproduit la façade du Parthénon, dont Royce était tombé amoureux - est unique et frappée des initiales de son artisan.

 

Le début de la passion indienne pour les Rolls

 

Cette passion pour ce que l’on surnommait à ses débuts le carrosse sans cheval, a duré des décennies. Elle a donné lieu à des créations incroyables, pour honorer des commandes spéciales. La première, passée directement par un Indie7100d92e-61f2-11e0-93c7-a6474c7e0ea7.jpgn, remonte à 1901. Elle émanait de l’industriel Parsi Jamsetji Tata. Toutes les marques étaient représentées: Alfa Romeo, Bentley, Bugatti, Cadillac, Crossley et Duesenberg, Hispano-Suiza, Humbers, Lanchester, Maybach, Mercedes- Benz, Minerva, Napier, Pierce Arrows… Mais c’est la Rolls-Royce, surnommée «The best car in the world», qui a eu incontestablement la faveur des Indiens. Les maharadjahs suivaient en fait les goûts de la famille royale britannique.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Le célèbre collectionneur le Maharadjah Jai Singh

 

Alwar_Lanchester_Delhi_rally_magnum_photos.JPGUn des collectionneurs les plus célèbres était le maharadjah Jai Singh. Il gouverna l’Etat de l’Alwar au Rajasthan de 1922 à 1933 et mourut à Paris en 1937, après avoir été exilé par les Britanniques. Il possédait une quinzaine de modèles Hispano Suiza, tous différents. Mais sa voiture favorite était le H-6B series. Hindou strict et végétarien, il ne voulait pas de cuir dans les aménagements intérieurs. Des plaques sur les deux côtés du capot indiquaient à quoi servaient les voitures, qui étaient équipées aussi de puissants phares pour pouvoir chasser de nuit. Et elles avaient même des cloches que l’on actionnait pour ne pas effrayer le bétail sur la route. On raconte qu’il achetait ses voitures par trois et qu’il enterrait les précédentes au cours d’une cérémonie.

 

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Il ne devait pas être toujours facile de traiter avec les Maharadjahs et plusieurs histoires circulent à ce propos. Ainsi, un maharadjah, vexé de s'être vu refuser l'achat d'une Rolls-Royce, s'est rendu directement à l'usine où il commanda dix châssis. Arrivés en Inde, ils furent carrossés en bennes à ordures !

 

 

 

 

 

 

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21 mai 2011 6 21 /05 /mai /2011 10:33

rajagari.jpgOn l’a souvent écrit dans ce blog, l’Inde a eu dans le passé beaucoup de richesses. Ainsi l’Inde a acheté un grand nombre de Rolls Royce au cours des 50 premières années du siècle précédent. Retour sur ces voitures de légende…

 

Quand les britanniques régnaient encore en maître sur les Indes (sur plus de 400 millions d’habitants au moment de l’indépendance, en août 1947), il y avait en fait deux Indes :

D’une part l’Inde des provinces et des territoires directement administrés depuis New Delhi par les Anglais (soit 310 millions d’habitants, répartis sur les 2/3 du territoire) et, d’autre part, l’Inde des Principautés autonomes, en tout 565 Etats princiers semi-indépendants (soit 100 millions d’habitants, : un quart de la population totale, répartie sur environ 1/3 du territoire de l’Empire des Indes).

 

Il s’agissait là de principautés dont les souverains héréditaires (et souvent absolus) s’étaient montrés loyaux envers les britanniques sur les champs de bataille (on se souvient - par exemple – de la loyauté de l’Hyderabad durant les guerres marathes ou contre les établissements français - à la charnière des XVIIe et XVIIIe siècles - ou de la vaillance des Maharadjahs rajpouts de Bikaner, de Jodhpur et de Jaïpour, Rajasthan lors des campagnes de la Somme, de Palestine et d’Italie – notamment à Monte cassino – lors des deux guerres mondiales), honoraient régulièrement ou avaient recherché l’alliance britannique ou avaient formellement fait acte d’allégeance à la couronne britannique.

 

Tous propriétaire de palais luxueux et somptueux, d’haras immenses et d’énormes troupeaux d’éléphants de parade, collectionneurs de voitures de luxe, de trains privés et de diamants de taille et de valeur inestimables (la plus grosse topaze du monde, propriété du maharadjah sikh de Kapurthala.

 

Ils formaient là une aristocratie hors du commun qui fit dire à Rudyard Kipling que ’’ces hommes avaient été créé par la providence afin de pourvoir le monde en décors pittoresqueRTEmagicC_503b3da868_jpg.jpgs, en histoires de tigres et en spectacles grandioses’’ : excentricités, prodigalités, exotisme et rêve d’une époque féérique alors sur sa fin. Comptant parmi les hommes les plus riches du monde, chacun des 565 membres de cette vaste confrérie princière possédait en moyenne 11 titres, 6 femmes, 12 enfants, 10 éléphants, 3 wagons de chemin de fer privé, 3 Rolls-Royce et un palmarès de 23 tigres abattus.

 

Mémorables et légendaire prince de Bharatpur (avec sa collection de tapis faits en perles d’ivoire et sa Rolls-Royce - réputée d’influence ’’aphrodisiaque’’ - en argent massif...), prince de Mysore (dont le trône en or massif pesait plus d’une tonne, qui célébrait chaque année avec ostentation le ’’roi’’ de son troupeau d’un millier d’éléphants, prince de Bénarès (qui se faisait réveiller chaque matin par les meuglements d’une vache sacrée hissée, pour l’occasion, jusqu’à la chambre du royal dormeur...), prince marathe de Junagadh ou rajah de Dhenkanal (qui invitaient toute l’Inde princière aux mariages - en grande pompe - de leurs chiens ou éléphants domestiques respectifs, lesquels vivaient en écuries dorées ou en appartements avec électricité et téléphone...), prince d’Alwar (dont la voiture « Lancaster » plaquée or - en intérieur comme en extérieur - était alors une réplique exacte du carrosse de couronnement-3BU76-201937-20PIII-20Barker-20Sedanca-20de-20Ville-20Maha.jpg des rois d’Angleterre...), prince sikh de Kapurthala, Pendjab (qui s’était fait construire la réplique d’un petit Versailles aux pieds de l’Himalaya...), excentrique prince marathe de Gwalior, Malwa (chasseur-tueur d’environ 1400 tigres, prince dont un train miniature faisait le service à table... ou qui fit vérifier la solidité des toits de son palais en y faisant promener l’un de ses éléphants...), heureux prince sikh de Patiala, Pendjab (goinfre au vingt kilos de nourriture par repas, qui mangeait deux à trois poulets entiers à son quatre heure, propriétaire d’environ cinq cent chevaux et aux près de 350 épouses et concubines...).

Pingre prince d’Hyderabad, propriétaire du légendaire diamant ’’Koh-i-noor’’ des anciens souverains moghols, vivant dans la plus extrême dénuement apparent (s’habillant en pyjama et sandales...) avec ses cent quarante épouses et concubines peuplant son harem (et autant d’enfants...) et sa collection de plusieurs centaines de voitures de luxe, à proximité d’une douzaine de camions enfoncés dans le sol jusqu’aux essieux puisque bourrés de lingots d’or et de malles dont le contenu représentait - en petites coupures dévorées par les rats.

Certains d’entre eux brillant également par leur humanité, leur modernisme et leur implication dans les oeuvres humanitaires, charitables, éducatives et sociales : les maharadjahs de Bhopal et de Baroda ayant beaucoup oeuvré pour les femmes et pour la condition des intouchables (les loger, les vêtir, les instruire...), le maharadjah de Bikaner, Rajasthan ayant beaucoup fait pour l’irrigation du Rajasthan, celui de Mysore et de Jaïpour, Rajasthan y ayant respectivement ouverts un observatoire d’astronomie et une université scientifique de renom (et beaucoup fait pour le développement de industries locales), celui de Kapurthala, Pendjab ayant également beaucoup fait pour le développement des infrastructures (hopitaux, voies ferrées, écoles) de sa principauté, etc... si bien que les conditions de vie dans les Etats princiers étaient très souvent beaucoup plus favorables aux populations locales que ce n’était alors le cas dans les territoires de l’Inde des provinces, territoires directement placés sous la ’’gouvernance’’ coloniale britannique.

 

C’est vers cette Inde que 900 Rolls-Royce seront livrées entre 1907 et 1947.

 

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